mardi 29 mai 2007

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Nous reproduisons l'intégralité d'un article publié sur le blog de Didier Medori, chargé de cours à l'Université Pierre Mendès France Grenoble II. Il s'agit de connaître un peu plus les réélles ambitions d'Alain Carignon à court et surtout à long terme sur Grenoble et ce, sur fond d'arrières pensées, de magouilles et d'intimidations.

Bonne lecture !

Carignon, pervers pas pépère… (à retrouver sur le blog de Didier Medori http://didiermedori.blog.lemonde.fr), le 19 mai 2007

Deux élus, pourtant sarkozistes, exclus cette semaine en Isère, pour ne pas avoir fait allégence au fils prodigue Alain Carignon… Mais au final, le grand retour de ce dernier pourrait faire pshitt…

L’UMP a décidé d’exclure cette semaine deux élus pourtant très actifs dans la campagne présidentielle : Mathieu Chamussy, leader de l’opposition municipale de la ville de Grenoble, et Richard Cazenave, député sortant de la première circonscription de Grenoble. Motif officiel : les deux édiles ont maintenu leurs candidatures aux législatives contre les candidats investis par l’UMP… et notamment contre Alain Carignon, le fils prodigue de retour après cinq ans d’inéligibilité.
Petit rappel des faits : en 1983, Alain Carignon profite de sa jeunesse, du tournant de la rigueur qui déçoit les sympathisants de gauche (et aussi d’une abstention record), pour gagner une des villes les plus à gauche de France grâce à son visage de “gaulliste social’. Quelques années plus tard, c’est le Conseil général de l’Isère qu’il conquiert, face au dinosaure mitterrandien Louis Mermaz. Après quelques réalisations, certes notables, et alors qu’Alain Carignon devient un super-cumulard sous le gouvernement Balladur avec cinq casquettes différentes (maire de Grenoble, président de la communauté d’agglomération grenobloise, président du Conseil général, député de la première circonscription de l’Isère, et ministre délégué à l’Environnement), les ennuis judiciaires commencent avec la dénonciation de conditions illégales d’attributions de marchés publics, notamment dans le secteur de l’eau. Une dénonciation portée principalement par des élus écologistes, certains élus socialistes ayant tiré quelques profits du ’système Carignon’ (Christian Nucci, ex-ministre de Mitterrand, fera notamment partie des mises en examen côté gauche…). Quoi qu’il en soit, pour quelqu’un qui n’a selon ses déclarations “guère plus profité du système que tout le monde” (1), la sanction est relativement lourde pour un élu de son rang avec cinq ans d’inéligibilité (dont un avec sursis), et un an d’emprisonnement ferme. Pendant ce temps-là, l’UMP perd élections sur élections, la mairie de Grenoble en 1995, plusieurs circonscriptions en 1997, leConseil général en 2001, et la région Rhône-Alpes en 2004…
Mais l’homme “a changé”. Il refrappe à la porte de l’UMP Isère, une fois sa peine purgée, pour apporter son expérience de simple militant. “Vous vous êtez bien fait couillonner !” lancera Alain Juppé aux édiles isérois qui n’ont pas voulu claquer la porte à celui qui leur a permis de décrocher un siège en terre de gauche (2). Et en effet, le ’simple militant’ qui a changé, sauf au niveau de l’ambition, est devenu grand patron de l’UMP Isère en 2004, en a profité pour installer un de ses proches (Fabien de Sans Nicolas) à la direction nationale des jeunes UMP, puis annonce après le deuxième tour des présidentielles qu’il brigue la mairie de Grenoble aux municipales de 2008 (3). A condition qu’il prenne auparavant la circonscription de son “ex-ami” Cazenave, normalement taillée pour la droite, et qu’il ruine les chances de son jeune challenger Mathieu Chamussy.
Alain Carignon s’appuye sur le soutien d’une fédération dont il a fait exploser le nombre des adhérents grâce à son charisme… et aussi parce que “faire adhérer des familles entières, je ne sais pas le faire !” (4), selon un Richard Cazenave très remonté. Surtout, Alain Carignon bénéficie du soutien de son collègue du gouvernement Balladur, Nicolas Sarkozy. Un soutien très discret, du reste. Lors de son élection à la tête de l’UMP Isère, Alain Carignon avait promis que Sarkozy tiendrait un meeting en Isère… Il n’y mettra jamais les pieds en campagne, se contentant de venir soutenir Carignon lors d’un bureau départemental de l’UMP en Nord-Isère avant de s’eclipser par une porte dérobée, loin des journalistes… Quand on est contre les fraudeurs et les délinquants, il y a des relations qu’il vaut mieux ne pas montrer en plein jour…
Le problème, c’est qu’Alain Carignon n’a pas vraiment de chiffres appuyant l’efficacité de son retour. Lors des élections régionales de 2004, la liste PS de Jean-Jacques Queyranne obtient 60% des suffrages à Grenoble… Pire : il se brouille avec l’UDF lors des cantonales en tenant à présenter un candidat UMP contre un candidat UDF sur le canton de Grenoble 1. Résultat : la droite est exclue du deuxième tour… Et surprise : au deuxième tour, Carignon appelle à voter pour un candidat vert (pourtant très à gauche) pour priver la majorité sortante d’un de ses vice-présidents, et semer la zizanie entre socialistes et écologistes (5) à la ville de Grenoble. Mission accomplie avec succès. L’homme a changé, sauf pour les coups tordus, guère appréciés même au sein de sa propre famille politique…
Pour se relancer, Carignon compte reconquérir un siège de député qu’l avait occupé de 1993 à 1995. Celui de la première circonscription de l’Isère, une circonscription réputée très à droite, chevauchant les quartiers les plus riches de Grenoble et les contreforts résidentiels de la Chartreuse. Problème : la place est occuppée par Richard Cazenave. Ce dernier, qui est un des rares députés isérois à ne cumuler aucun autre mandat, s’appuye sur sa très grande activité parlementaire (il fut entre autres un des rares députés de la majorité à s’opposer à la loi DAVSI), et le soutien des élus locaux (6) pour se maintenir. Alain Carignon s’appuye sur un vote interne des militants UMP (on s’en doute, guère influencés par leur patron…) pour défendre sa légitimité. Entre les deux, le courant ne passe plus et les noms d’oiseaux pleuvent par blog interposé (7). La gauche compte profiter de cette excellente ambiance : Ségolène Royal n’a été distancée par Nicolas Sarkozy que de 790 voix sur cette circonscription réputée à droite, et la candidate investie par le PS, Geneviève Fioraso (8), proche de DSK et ancienne cadre, n’a pas le handicap (pour la circonscription) d’être estampillée “trop à gauche”. En récupérant les voix de droite hostiles au retour de Carignon, ou déçues par la guéguerre interne, elle peut tout à fait compter créer ce qui serait une des plus grosses surprises des législatives. Et ainsi dégager la voie pour le maire sortant de Grenoble, le socialiste Michel Destot, dans l’optique des municipales de 2008.
Michel Destot qui, de son côté, affrontera lui aussi deux candidats de droite sur une circonscription pourtant a priori ingagnable pour l’UMP (Ségolène Royal y a obtenu plus de 60% des suffrages…). Mathieu Chamussy, qui pense à la mairie de Grenoble en se rasant, est l’un d’eux. Pour contrer ses ambitions, et histoire de faire un peu de parité sur une circonscription ingagnable (9), l’UMP a préféré investir par la voix de son maître la quasi inconnue Nathalie Béranger. Problème : son suppléant, Hervé Gerbi (10), a décidé de rejoindre à son tour le front des opposants au retour d’Alain Carignon…

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